Les Cowboys Fringants - Break Syndical

Hiver 2005, je sors de la salle de spectacle La Tulipe après un show mémorable des Cowboys Fringants qui viennent de sortir l'album La Grand-messe, celui qui m'a permis de découvrir le groupe. Quelques semaines plus tard et toujours la tête dans les étoiles filantes, j'ai souvenir de traîner sur la rue Saint-Denis au bout de ma rue Lajeunesse pas loin du métro Jarry quand je rentre dans un magasin de disques. j'en suis ressorti avec Break Syndical, sûr de mon achat.

Deux décennies cette année, il fallait bien que je fête les 20 ans de Break syndical sur Break musical ! Cet album est dans ma valise pour aujourd'hui et demain, cet album est une balise dans ma vie passée, dépassée. Ce quatrième album, celui de la dernière chance lors de sa réalisation, est l'un des meilleurs des Cowboys Fringants car il marque véritablement le tournant de leur belle carrière. Alternant brûlot contre la politique fédéraliste et capitaliste marquant leur génération mais aussi celle d'après et chansons attendrissantes, toutes émotions qu'elles soient, sont ici authentiques.

L'hiver approche est probablement celle qui m'émeut le plus. Car il y a des chansons comme ça qui tape dans le mille de nos propres histoires. En pleine misère à l'époque, les poches vides, le cœur troué et l'esprit perdu, je me suis vite laissé happer par la mélodie qui valse sur l'accordéon de Marie-Annick. Et paradoxalement, le refrain comme oxygène te fait bomber le torse. Je l'aime cette chanson, à la folie et même que d'vant mon verre de bière vide / Ma gorge est une terre aride / Ça m'prendrait dont un p'tit r'montant / Pour faire passer mon mauvais temps / Mais j'ai pas une cenne dans les poches / C'tout l'temps d'même quand l'hiver approche... Et question de se faire happer, Mon chum Rémi apporte aussi son lot d'émotions, car on a tous connu un Rémi dans notre vie. Le mien s'appelait David et il avait préféré partir Tsé, Rémi, moi aussi / J'en viens à me d'mander / À quoi ça sert la vie / Quand ça s'met à clocher. Pour terminer dans le mélodramatique, la dernière chanson de l'album est un feu d'artifice dans le genre : Ruelle Laurier, une des rares chansons écrites par Karl, aux paroles déchirantes qui exposent un univers familial défaillant et violent sur fond de violon poignant. Terriblement beau. Pis pour un peu de réconfort et de mélancolie, Toune d'automne première chanson de l'album du groupe à passer à la radio, si elle est un peu tristounette, elle prend dans les bras pour un gros câlin et file ce petit sourire aux coins des lèvres malgré tout.

Anyway chu content que tu r'viennes
T'arrives en même temps qu'l'automne
Tsé qu'ça m'a fait ben d'la peine
De t'voir partir ma mignonne...

Côté rouleau compresseur, l'album débute avec l'explosif En berne. Inspiré de la chanson Hexagone de Renaud, le pendant québécois montre vraiment pour la première fois au grand public un groupe engagé, critique, prônant la solidarité populaire. Loin des ritournelles folklo-country humoristiques des premiers albums, dans la rythmique d'une batterie folk-rock, le sentiment d'urgences est audible, frappant. Des paroles fortes contre la montée en force du néolibéralisme, qui ont finies par traverser l'Atlantique et trouver écho dans notre chère hexagone. Facile : Si c'est ça l'Québec moderne / Ben moi j'mets mon drapeau en berne / Et j'emmerde tous les bouffons qui nous gouvernent ! / Si c'est ça qu't'appelles une nation ! / Probable que tu sois assez con / T'es mûr pour te présenter aux élections... Pour le reste, La Manifestation n'est pas en berne tout comme Joyeux calvaire véritable hymne de scène. Ça danse festif sur La tête à Papineau, Quand je r'garde, Heavy Métal et l'âme s'envole sur l'instrumental Break syndical...

À la manifestation
On rêvait de révolution
Se gelant le cul avec une poignée de comparses
Sous la pluie froide du mois de mars

Le bouche à oreille au rendez-vous va propulser l'album au rang de phénomène, devenant un véritable patrimoine national. J'ai raison d'exagérer non ? L'extrait ci-dessus au Centre Bell un an après la sortie du disque résume parfaitement l'effet qu'il a engendré.
Vingt ans plus tard, je pense que Break syndical résonne toujours aussi fort dans le cœur de ceux qui désirent sans relâche une vie plus juste, une vie plus douce, une vie plus joyeuse en se nourrissant des ingrédients que Les Cowboys Fringants vont commencer à parsemer dans leur musique et dans leurs chansons tout au long de leur parcours discographique... En commençant avec ce délicieux disque.  


Tracklist
01 - En berne
02 - La tête à Papineau
03 - Toune d'automne
04 - Heavy métal
05 - La manifestation
06 - Break syndical
07 - L'hiver approche
08 - A 'polyvalente
09 - La noce
10 - Quand j'regarde
11 - Mon chum Rémi
12 - Salut mon ron
13 - Joyeux calvaire
14 - Ruelle Laurier

05 mars 2002
La Tribu


www.cowboysfringants.com

Commentaires

Les articles les plus consultés du moment

Le temps qui reste de Serge Reggiani

Dominic Sonic - Qu'avons-nous fait (2024)

Les nouveaux clips du moment #4

Bertrand Betsch - Kit de survie en milieu hostile (2024)

Mon album-live préféré d'Hubert-Félix Thiéfaine