Ce soir du 15 novembre...

Ici dans notre petit coin de Bretagne nous vivons depuis dix jours sous le brouillard sans avoir vu le moindre bout de soleil mais aujourd'hui juste avant que la nuit ne tombe, j'ai eu droit à un couchant d'automne magnifique. Le genre de crépuscule avec des lumières à vous exploser le cœur, une vraie symphonie de vie, apaisante. Ça tombe bien, le mien est bien souvent lourd. Casque sur les oreilles pour la balade du soir, j'écoute pour la énième fois Les Cowboys Fringants. Sans hasard, c'est l'un de ces moments dont j'ai eu le plus besoin cette année. Comme une connexion pour ne pas dériver. Que ce soit en hiver, au printemps, en été, aujourd'hui, ces sensations-là ont été les mêmes. Les yeux embués, les sanglots qui montent, le sourire jamais trop loin. La mort de Karl Tremblay a eu un impact immense sur moi, touchant profondément mon cœur et mon esprit. Je est nous, il n'y a qu'à voir sur les réseaux combien cette disparition touche les gens. Bien que je ne l'ai jamais rencontré, je ressens une douleur intense comme si j'avais perdu un proche. Ce phénomène, je l'ai appris sur une publication intéressante concernant justement la disparition de Karl, qui parlait du lien affectif avec une célébrité qui provoque une peine réelle. Ça s'appelle le deuil parasocial.

Ici bas

Mais ce n'était pas que de l'affect. Karl incarnait, à travers Les Cowboys Fringants, des valeurs humanistes et sociales qui résonnaient en moi depuis ma jeunesse, des valeurs qui me permettaient d'avancer, de grandir mentalement. Ses chants tantôt sensibles, tantôt exutoires et sa personnalité intègre m'ont permis de m'identifier à lui, au nom du groupe, et de m'aider à me comprendre, à comprendre ce monde, parfois à l'accepter, souvent à l'affronter. Sa fin tragique et prématurée a intensifié ce sentiment de perte, ce désert que je n'arrive pas à expliquer.

“On a tous au fond de nous
Des longs chemins de cailloux
Des pianos sur les épaules
Et des grosses larmes de saules
Des sentiers moins lumineux
Qui courts après les matins heureux
Et cette force qui est partie
Nous laissant sous l’temps gris de la vie”

Bobo - Les Cowboys Fringants

En tant que figure emblématique, Karl avait ce talent d'offrir réconfort dans mes interrogations et légitimité dans mes convictions, axées sur le respect, l'entraide, la bienveillance, l'amour, prendre du bon temps… La vie quoi. Son décès laisse un vide abyssal, un livre rempli de questions sans réponses, de doutes, de routes effrayantes vers un avenir flou. Où sont les routes du bonheur ? Car, à l'image de ses comparses de Cowboys, il était un modèle, une source d'inspiration pour poursuivre mes rêves et dénoncer les injustices qui frappent de plus en plus cette civilisation qui m'effraie jour après jour.

Ce soir le ciel était magnifique en même temps que jouait Sur mon épaule dans mes oreilles.
C'est un beau début de soirée pour se souvenir.

“On vieillit, les années passent
Et chacun de nous fait comme il peut
On court, on tombe, pis on s'ramasse
On essaie d'être heureux”


La voix de Karl, c’était la petite voix au fond de nous pour exprimer mieux nos propres émotions que ce qu’on pouvait nous même faire. Il était ce miroir subtil et puissant, une résonance intime de nos pensées et de nos sentiments. Dans chaque phrase, chaque silence, il nous rapprochait de cette vérité intérieure, nous permettant de nous comprendre et de nous retrouver.

C'est ce qui le rendait unique, tout comme Les Cowboys Fringants.

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