Eddie Vedder - Into The Wild (2007)

Le quai de la gare est désert et à son bout, mon train m'attend. J'arrive toujours le premier pour ne pas courir, je préfère prendre le temps. J'accroche mon vélo, je m'assois et je sors mes écouteurs. C'est le rituel de fin de journée quand je rentre à la maison. Ce soir j'ai besoin de m'enfuir avec de la musique. Ceci n'est pas une chronique d'album, c'est une chronique de vie.

Ce matin, une publication instagram de Action Protection Animale annoncée la mort d'un Malinois utilisé pour la sécurité. L'animal a était retrouvé au domicile de ses maîtres, mort, allongé sur un balcon de moins d'un mètre carré, au milieu de ses déjections. La gueule dans sa gamelle d'eau désespérément vide. La femme de l'agent cynophile ouvrira à l'association alertée par des signalements extérieurs. Elle expliquera qu'elle a appelé le chien il y a quelques jours mais qu'il n'a pas répondu, ce qui manifestement ne l'a pas inquiété... Il s'appelait Loup et avait huit ans.
Et puis ce soir, sur la route, en venant à la gare, j'ai vu une chose horrible. C'était déjà une journée suffisamment grise, mais voir cet homme battre son chien a anéanti le peu d'espoir que j'avais emmagasiné dans la journée. J'aurais voulu réagir, mais je pense que les autres personnes de sa communauté, à quelques mètres de la scène, m'auraient laissé pour mort au milieu de la rue.

Je suis triste, je pense à ces deux chiens et tous les autres... Très triste que l'on fasse du mal à ces êtres inoffensifs qui ne réclame qu'un peu d'amour. S'ajoute à ça l'horreur des guerres actuelles et les victimes innocentes, la débilité profonde qui gangrène notre société, la malveillance, la montée de l'extrême-droite un peu partout... Comme maigre réconfort, j'ai décidé de me plonger dans la bande originale de Into the Wild composée par Eddie Vedder. Ce disque adoucit rapidement les plaies et permet de prendre son envol, loin tout en restant sur place, vers un endroit imaginaire où chaque auditeur a envie d'aller. Je connais ce lieu par cœur, c'est mon refuge face aux horreurs. Ça fait du bien un peu de douceur et d'évasion dans les oreilles...

Je n'ai pas vraiment l'âme d'un Christopher Supertramp, mais je me dis qu'on serait bien mieux dans la nature, au milieu de nulle part, surtout seul. Pour profiter du silence. Pour profiter de la vie tant qu'elle est belle. Pour profiter d'un arbre, s'asseoir sous la protection de ses branches et contempler le temps qui passe. La voix d'Eddie Vedder fait vibrer quelque chose d'inexplicable en moi. J'ai envie de pleurer, je me sens résigné, comme j'ai envie de hurler, me sentant prêt à affronter les affres de ce monde ignoble. Les mélodies de ces dix titres me couvrent de force tout en me mettant à nu. Trop de sensibilité, je suis sur une montagne russe, sur ce manège de la vie, je prends mon pied comme je peux. Ce disque est sublime, tout autant que le film. Je gratte un peu de bonheur avec mes ongles sales. Chaque jour, les médias s'excitent dans tous les sens, la planète est en feu, l'humain est une braise qui ne cherche qu'à s'enflammer, putain que ça fait du bien quand la musique nous reconnecte à quelque chose qui semble plutôt beau et agréable, même si l'histoire de ce film...

Le train s'arrête, je descends. Je traîne des pieds sur le quai, je laisse la foule disparaître dans la nuit. Guaranteed sous les étoiles et dans les écouteurs, je retrouve le sourire pour un petit moment précieux sans pour autant faire l'autruche. Du moins jusqu'à la prochaine horreur qui me sépare toujours un petit peu plus de l'humanité.



Commentaires

Les articles les plus consultés du moment

Les Cowboys Fringants - Pub Royal (2024)

Le temps qui reste de Serge Reggiani

Thomas Cousin - L'île déserte (2024)

Les nouveaux clips du moment #5

Sans Voies - Le bonheur des tempêtes (2024)