Arno - BRUSSLD (2010)

Les amoureux de la Belgique et principalement de Bruxelles savent qui est Arno et ce qu'il peut représenter. Le chanteur ostendais d'origine mais bruxellois d'adoption, celui qui a dû faire frissonner plus d'un parmi nous avec son titre "Dans les yeux de ma mère" chanté sur un plateau télé. C'est comme ça que je l'ai découvert, c'était bouleversant, et bien qu'ayant un gros faible pour les chanteurs avec ce genre de voix rocailleuses, je n'avais jamais pris le temps de me plonger entièrement dans son univers. Pour des raisons belges que je ne citerai pas, j'ai voulu franchir le pas. Bien assis confortablement dans le fauteuil, le casque sur les oreilles, une bière à la main, je suis allé à la rencontre du chanteur avec son dernier album BRUSSLD.


Quarante-cinq minutes plus tard je suis resté assis un long moment dans un silence religieux. Ce sentiment qui vous empare lorsque quelque chose d'inouï et de formidablement agréable mais dont on arrive jamais à trouver de nom, ne m'a pas lâché. Il a traversé mon corps de la tête aux pieds comme une injection de bonheur, mais un bonheur pas si rose que ça... avec des tâches noires partout, beaucoup de lourdeur, mais, même si ce n'est pas forcément réjouissant, il y a quand même une part rassurante qui se dégage chez le rockeur du plat pays.

J'ai repris mes esprits, et j'ai remis une couche.
Le premier morceau de l'album "Black dog day" aux accents rock des années 80 transpire les salles obscures des cafés-concerts miteux qui peuvent peut-être paraître laid aux yeux de certains, mais dont on y fait parfois les meilleurs shows du genre. Arno se montre, d'entrée de jeu, généreux et trépignant jusqu'à devenir, d'un coup, complètement attachant et perturbant sur "Quelqu'un a touché ma femme". Deux chansons à peine que déjà deux facettes opposées, l'artiste ne se prend pas au sérieux et reste le plus sincère possible. Et c'est un peu pour ça qu'il est si attachant, surtout lorsqu'il chante ce genre de chanson fragile dont lui seul semble avoir le pouvoir de faire trembler les mots de cette façon. Bon sang! Comment fait-il pour véhiculer une aussi forte émotion à travers une chanson ?

"Mademoiselle" est le morceau qui me fait physiquement le plus d'effet. Musicalement il me fait tellement trembler les tripes que j'hésite à me sentir mal à l'aise ou proche d'un plaisir intense. Ou les deux à la fois. Puis la voix collée par-dessus, je ne vous raconte pas... vous comprenez que c'est le good trip musical par excellence. Ouais c'est ça ! C'est frétillant.
"Elle pense quand elle danse" sonne entre la douce fièvre d'un "Dans les yeux de ma mère" et d'un hommage, comme la reprise "Les Filles Du Bord Du Mer" d'Adamo. Même en cherchant le microscopique défaut, on ne peut qu’adhérer. Surtout que derrière, vient "Get up, stand up" de Bob Marley... Non ne criez pas, écoutez d'abord ou ne lisez pas les mots que je vais dire, je pourrais choquer plus d'un fan de l'icône jamaïcaine. Car, en toute honnêteté, bien qu'appréciant l'originale en reggae, je préfère de loin cette version piano-bar chantée par un crooner à l'alcool désabusé.

Après quelques aller-retours dans la capitale belge pour le plaisir et la musique (Bruxelles a le meilleur public du monde !), après y avoir parcouru ses rues, bu dans ses bars, transpiré dans ses concerts... "Brussels" me résonne maintenant dans la tête comme une évidente hymne pour la capitale européenne. Le reflet de tout ce qui se fait de mieux et de pire dans cette ville cosmopolite, avec sa grisaille, avec son soleil. "Petit pays avec un grand esprit"... Dans BRUSSLD on y retrouve également des titres avec un bon son rock incisif et efficace comme "God save the kiss" ou encore "How are you". Enfin "Pop star" morceau impulsif à l'allure funk dont l'harmonica est très entrainant et "Ginger red" dans un style blues-jazz prouve que le panel de l'artiste est très large. "Ça monte" conclut un album qui nous met tous d'accord sur un point : notre ami belge est au sommet de son art.



Cet album est une réussite ? Le superlatif est franchement tout petit... Cet album est puissant ? Mouais c'est encore léger... Cet album est une référence ? Bof, ça sonne trop religieux... Bon je ne trouve pas mais quoiqu'il en soit, cet album aurait eu des titres moins travaillés, moins convaincants cela n'aurait peut-être rien changé car la provocante énergie et la gouaille magnifique d'Arno auraient fini par sublimer ces morceaux. C'est ainsi que l'on reconnaît les grands artistes... donc forcément avec des morceaux à la hauteur du chanteur, on ne peut qu'applaudir pendant des heures.

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