Manu Chao - Clandestino (1998)

Voilà un album qui me renvoie dans le passé sans compromis et sans mettre de gants. Quand il m'arrive de glisser le disque dans le lecteur, tout est là. Les mélodies diffusent les couleurs, les odeurs, les sensations, les sentiments de cette époque bien précise, un laps de quelques mois, une année ou deux grand max. J'y ressens l'utopie et l'insouciance d'une jeunesse, et tout ce qui va avec aussi. Les multiples galères d'un jeune qui devient difficilement adulte, ses histoires de cœur, ses histoires de culs, ses aventures alcoolisées, les rêves d'un monde meilleur, les rêves tout court, les déambulations dans les rues de Barcelone et les envies d’évasions. Car Clandestino emporte indéniablement hors des frontières, il m'a ouvert l'esprit en m'invitant à m'intéresser à d'autres cultures et d'autres musiques. Grâce à lui, j'ai sorti un pied d'un rock alternatif dont j'étais féru à l'époque, la Mano Negra en tête. Les bérus, les Garçons Bouchers, Ludwig Von 88, Les Shériff... Partir ailleurs ou rester dans le coin, de Gilberto Gil en concert au CD du Buena Vista Social club usé jusqu'à la moelle en passant par Mercedes Sosa ou Cesaria Evora, et à quelques kilomètres, les Spook and the Guay, Zebda, les Négresses vertes, Massilia Sound System...

Clandestino à fond à l'instant et je me retrouve propulsé dans ce quinze mètres carrés aux portes du quartier gitan à Perpignan, vingt-cinq ans plus tôt. C'était le désordre par terre, c'était le désordre dans l'évier, c'était le désordre sur la table basse, c'était le désordre sur le lit, ça sentait la vie sous la couette, une chaussette sale par-ci, une canette vide par-là. C'était le désordre dans ma tête, c'était le désordre dans ma vie, c'était le désordre dans mes relations, mais c'était un beau désordre quand j'y repense. Parce que j'ai vécu tout ça accompagné d'une excellente musique qui, avouons-le, nous a procuré et nous procure toujours des vibrations uniques. 

Qui ne connaît pas le célèbre titre Clandestino ou l'excellent Je ne t'aime plus. Je les aime, c'est évident, mais  je préfère ne pas me lasser des autres chansons : Mentira, Luna y sol, Lagrimas de oroDia luna... Dia pena, Minha galera et El viento... L'album est une pépite. Patchwork de seize titres où le savant mélange de guitare acoustique, de samples de films, de radios, d'enregistrements sonores dans les rues, dans les bars, de contre-temps reggae, de rythme de rumba et celui du swing pour un enregistrement "fait maison" donnent un côté intime, proche, accessible, fédérateur. C'est un voyage vers l'Amérique du Sud mais pas que... En français, en espagnol, en arabe, en anglais, on s'y retrouve tous dans ce carnet de route d'un chanteur qui parcours le monde en quête de thérapie après la fin de la Mano. Au fil des étapes, il enregistre un peu, capte l'humeur locale comme des souvenirs et parce que c'est ce qu'il fait de mieux même s'il pense en finir avec la musique. Une escale à Rio lui fait découvrir la techno hardcore. Aux antipodes de ce qu'il faisait avant, il décide de réunir ses croquis musicaux de voyages et d'en faire un disque, un dernier. Baroud d'honneur bourrin puis bug informatique, la techno disparaît et ne reste que la spontanéité "acoustique" de ce qui deviendra l'un des plus gros carton mondial de l'année 1998. 

Tracklist
01 - Clandestino
02 - Desaparecido
03 - Bongo Bong
04 - Je ne t'aime plus
05 - Mentira
06 - Lagrimas de oro
07 - Mama Call
08 - Luna y sol
09 - Por el suelo
10 - Welcome to Tijuana
11 - Dia luna... Dia pena
12 - Malegria
13 - La vie à 2
14 - Minha galera
15 - La despedida
16 - El viento

17 avril 1998
Radio Bemba under / Because Music


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