Nicolas Paugam - L'assassinat (2025)

L'exercice pourrait sembler périlleux de s'attaquer au répertoire de Georges Brassens, monstre sacré de la chanson française, sans tomber dans la simple copie ou le pastiche irrévérencieux. Avec L'Assassinat, son huitième album, Nicolas Paugam relève le défi en optant pour une voie audacieuse et singulière qui n'est rien d'autre que la sienne. 

Moi, Brassens était toujours dans les bons choix du diapason rouge quand je “chantais” dans mon adolescence. Comme autour d'un feu de camp chez les Éclaireuses et Éclaireurs de France, ou plus jeune en colonie de vacances. Puis j'ai grandi en aimant certains de ses illustres héritiers, Renaud en tête. D'ailleurs son album de reprises sorti en 1994 était vraiment pas mal. Très fidèle à l'œuvre d'origine, Renaud allant jusqu'à utiliser les mêmes instruments et musiciens du Sétois. Bien loin de ce nouvel album de Nicolas Paugam. Ici point d’hommage dépoussiéré mais une véritable métamorphose. Le chanteur, féru de musique brésilienne et déjà connu pour son style éclectique et excentrique, emmène neuf titres de Brassens sous des latitudes ensoleillées. Et c'est la que ce trouve la force de L’assassinat, dans le fait que l'on entend avant tout du Paugam dans ces reprises, plutôt qu'un Brassens calqué. Il ne cherche pas à imiter le maître, mais insuffle son propre univers, fait de poésie lunaire et d'une certaine étrangeté. De plus, j'apprécie énormément le choix des titres. N'étant pas un fan absolu de Brassens et ne connaissant que ses plus grands classiques, neuf titres sur onze me sont donc inconnus et m'offrent ainsi l'occasion de belles découvertes. Accompagné d'une section rythmique solide et de talentueux instrumentistes (violon, trompette jazz), Paugam déconstruit pour mieux reconstruire à sa façon. Si le risque était d'étouffer le texte sous les arrangements, Paugam parvient, par son génie, à le souligner et propose une modernité aux textes, prouvant leur universalité au-delà de leur contexte initial en guitare-voix. L'assassinat, le premier extrait avant la sortie du disque en est un bel exemple. Je plonge, fasciné, dans cette histoire qui raconte de façon ironique et macabre l'assassinat d'un vieil homme par une jeune femme et son complice après qu'il lui ait avoué être ruiné. Elle se termine par une confession pleine de sarcasme qui colle joyeusement à l'univers de Nicolas Paugam. Quand j'ai reçu le disque je n'avais qu'une hâte, celle d'écouter les autres titres. Dans ces ambiances renouvelées et inattendues, plus légères, détendues, entraînantes, je tombe très vite amoureux du premier titre Les ricochets, réflexion ironique sur les conséquences en chaîne des actes humains, illustrée par la métaphore des ricochets qui rebondissent de l’un à l’autre. Texte incroyable, reprise superbe, je file même écouter la version d'origine heureux qui comme Ulysse de découvrir une nouvelle œuvre de Brassens qui me procure beaucoup sur le moment. Quelle poésie ! C'est pareil pour Le mouton de panurge, Le cocu et Le 22 septembre

C'est une transmission, une belle, une très belle passerelle entre la chanson française la plus classique et des rythmes d'ailleurs. Je ne vois pas comment les puristes pourraient être décontenancés par ce Brassens rayonnant, audacieux, joyeux et finalement très fidèle à l'esprit libre et gouailleur de l'original. Excellent !

Tracklist
01 - Les ricochets
02 - Le mouton de Panurge
03 - Saturne
04 - Les trompettes de la renommée
05 - Le vieux Léon
06 - Maman papa
07 - Le cocu
08 - Le 22 septembre
09 - L'assassinat

28 novembre 2025
La Disqueuse

   

www.nicopaugam.bandcamp.com
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