Boucan - Ballad of John Kairos (2025)
Je le savais bien avant de me plonger dedans. Ballad of John Kairos est un album à vivre plus qu'à écouter. Boucan c'est une atmosphère trouble et vibrante, à mi-chemin entre le rock distordu et la chanson cabossée. Le duo livre un album dense, où chaque morceau semble être un recueil d'errances, une chronique d’exil intérieur et d’aventures au long cours.

L'album s'ouvre tel un road-movie musical aux sonorités brutes et organiques : Bla Bla c'est la chaleur des fanfares des lieux oubliés, les complaintes folk et les fulgurances d'un rock organique. Le chant tout comme la musique habitent les morceaux comme une incantation, tantôt rauque, tantôt lancinante, donnant à Ballad of John Kairos un aspect incantatoire à la Tom Waits. D'ailleurs, dans ses contrastes l'errance et l'évasion sont au cœur de cet opus. On sent l’influence des grands espaces, des bars enfumés, des lieux vivants où se mêlent poésie et chaos, des rêves de fuite où le temps se tord dans tout les sens. Après Kissos Milaou et Lola des villes (avec Lior Shoov) je viens à m'en dire que c'est ultra créatif, finalement éclectique tant les morceaux ne se ressemblent pas. Je saute de sensations à des ressenties différentes, envouté par un violon (Bastien Pelenc) discret mais efficace, de contrebasse ou de banjo mélancoliques et des rythmes tribales, parfois blues de derrière les fagots qui agissent sous ma peau. Après l'incroyable sublime Gedoe Met Geluid avec le néerlandais G.W Sok (du groupe The Ex), on comprend pourquoi Boucan refuse les étiquettes et aime s'aventurer sans filet dans l'expérimentation. On se retrouve dans ce que la musique à de plus belle à offrir : l'aventure créative, l'aventure auditive. Ce morceau de sept minutes est un voyage comme je les aime. Je ne comprends rien à ce qui est chanté, mais je sais ce qu'il me procure et ce qu'il me donne envie de faire : M'élever et en savoir plus, en découvrir plus. J'adore quand un groupe nous tend les clefs ainsi pour ouvrir une sorte de boîte de l’intellect. He Ho est aussi incroyable. Je ressens le grand écart entre fureur de l'Ouest et fièvre de l'Est qui me fait penser au Soviet Suprem qui viendrait se perdre en Irlande. En tout cas, voilà encore un morceau qui prouve que Bruno et Mathias s'éclatent, ce qui ferait sûrement plaisir à Piero. C'est clairement un disque pour émotif, et Lochten Bow est une tempête douce dans la tête. J'écoute le morceau, devant ma chronique en vrac, les yeux fixés quelques minutes sur le ciel en mouvant qui danse à ma fenêtre. Le temps s'exprime, il fait beau et c'est fort de faire ressentir tellement de choses comme ça à travers une chanson. C'est terriblement vivifiant, l'auditeur que je suis, s'imagine des tas d'histoires quand j'écoute ce disque qui ne s'apprivoisent pas immédiatement mais qui révèlent une profondeur renversante digne d'un film de David Lynch. Une écoute comme une expérience en clair-obscur qui laisse une trace indélébile, voici la marque des albums rares et de toute beauté.
Tracklist
01 - Bla bla
02 - Kissos Milaou
03 - Lola des villes (avec Lior Shoov)
04 - Hannah 89
05 - Gedoe Met Geluid
06 - He Ho
07 - Lochten Bow
08 - Bogolo
09 - Sinatra 62
31 janvier 2025
Popatex / Inouïe Distribution
www.facebook.com/duboucanenveuxtu
www.boucan.org
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