Feu! Chatterton - Labyrinthe (2025)

Amateur de frissons sonores en quête de vertige émotionnel : bonjour à tous. Bienvenue. C’est important de souhaiter la bienvenue. Ma confession est la suivante : ce nouveau disque de Feu! Chatterton est ma romance musicale du moment.

Comme pour toute première rencontre, on hésite timidement ou on plonge direct. Voir les deux à la suite. j'ai vu sur Facebook un connard dire « c’est juste de la chanson française avec des mots trop gros pour leur bouche ». Ben non. Ici ça tient, ça prend, ça claque. Une expérience sensationnelle et émouvante. Un entre-deux qui te vrille le cœur et les tympans. Rien n'est trop gros, tout est juste trop beau. Parce que là, ça répond en écho à ce monde à la con. D’une putain de méchante époque où faudrait pas y foutre les pieds et pourtant on y vit tous. Les morceaux s’ouvrent comme des portes de fête foraine : d’abord t’es happé par la lumière, les éclats de voix, les guitares qui griffent. Puis tu t’enfiles un verre de métaphore. Deux verres de désespoir. Trois verres de poésies. Quatre, cinq et j’en passe. Le verre déborde. À croire qu’ils avaient sacrément soif, les bougres. Merci pour l'ivresse !

Et comme l’alcool, la musique délie les langues. Ici ça cause amour, ça cause époque actuelle, ça cause relations, passions, illusions. Le verbe de Chatterton, c’est le bar où tout le monde se met à table : l’un rêve d’évasion, l’autre s’étouffe d’amour, un autre encore s’accroche à une utopie perdue. Charivari de sentiments, foutoir de vérités. Allons voir ce que la vie nous réserve ! Foutrement bienvenue, j'éteins la télé, j'enfile le casque sur les oreilles, je monte le volume et je réponds à l'appel. Puis vient le dérapage. On sombre dans l’électro, dans les nappes qui tournent, dans le vertige : Le labyrinthe. On sait plus si on danse ou si on s’effondre. Effet domino : tu deviens toi aussi dingue. Bienvenue dans le labyrinthe, frère. C’est facile à dire parce que c'est Feu! Chatterton mais il faut bien le reconnaître : cet album te colle au mur d'entrée. Il t’expose ce qu’il y a de plus dérangeant dans notre humanité, nos rêves fracassés, notre incapacité à faire sens. Il casse les limites de ce qu’on attend d’un disque de « rock français ». Et ça, qu’on aime ou qu’on déteste, c’est un putain d’effet. Sentimentalement j'offre mon cœur pour Ce qu'on devient. Ce n’est pas que ce qu’ils montrent qui est le plus fort, mais ce qu’ils laissent suggérer. La voix d’Arthur chemine entre les mots comme une caméra trempée dans la mer d’huile de mes souvenirs et le sang tiède de mes envies. Le refrain, la montée, c’est cette maîtrise totale qui m'envoute quand j'écoute ce titre. Que j'écoute EN boucle. Matin et soir depuis ce délicieux 12 septembre. « Mais tu sais je t’aime encore / Du même amour fou dingue ». Dingue ! Et plus ça avance, plus ça explose. Le disque finit en vrille dans mon esprit, en magma sonore où plus rien n’a de sens, ni de gravité, ou plutôt si, si le cœur m'y prend. Les mots s’entrechoquent, les sons m’avalent, les guitares se mélangent aux machines. La confusion est totale. Mais quelle beauté ! Suffit d'écouter À cause ou grâce, ce bijou fragile entre regret et gratitude, la confidence intime de Baisse les armes, L'étranger qui joue sur l'idée du déracinement et du poème d'Aragon, une navigation entre les mots et les temps, entre l'être qui part et celui qui reste. L’alcazar qui fonctionne comme un opéra miniature, un espace mental, un palais imaginaire pour y confronter certitudes et doutes. L'émouvant Mille vagues, bouleversant hommage face aux absents. Puis aussi Sous la pyramide qui conclut l’album dans une ambiance à la fois mystérieuse et solennelle, comme une descente dans les strates du passé, une forme de méditation sur ce qui reste sous les ruines du temps qui vient de passer. Rendre beau le chaos humain, rendre audible le vertige : voilà leur coup de maître. On participe, on aime, on danse malgré tout ce qui nous entoure. Et j’en redemande. Parce qu’au fond, la peur et le désir sont nos deux émotions les plus primaires et Feu! Chatterton en quelques magnifiques chansons, nous les renvoie en pleine face.


Tracklist
01 - Allons voir
02 - Le labyrinthe
03 - Ce qu'on devient
04 - A cause ou grâce
05 - Baisser les armes
06 - Cosmos song
07 - Mon frère
08 - Mille vagues
09 - L'étranger
10 - L'alcazar
11 - Le carrousel
12 - Monolithe
13 - Sous la pyramide

12 septembre 2025
Universo Em Fogo

www.feuchatterton.fr

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