Armelle Dumoulin - Kervran (2025)

Kervran est comme un secret transmis d'humain à humain, de mer à montagne, de silence en silence. C’est un album qui ne cherche pas forcément à faire de bruit, mais qui fera assurément écho.

Dès les premières notes d'Animalerie, un recueil s’ouvre à moi. Je marche pieds nus dans un poème intime, entre coton et granit, entre âme fragile et soleil après la pluie. Armelle Dumoulin chante avec la pudeur des coeurs vastes, celles qui savent que l’essentiel ne s’écrit pas en majuscules, mais en murmures. Sa voix est une braise douce, une plume qui gratte le cœur pour le faire battre autrement. Je pense à Barbara, à Juliette… mais c’est bien Armelle Dumoulin, dans toute son unicité, qui chante et m'enchante. Entourée de Julie Gasnier, d'Antoine Sahler et de Tatiana Mladenovitch, Armelle écrit une carte postale venue d’un ailleurs intime, peut-être même d’un rêve. On y ressent la mer, les absents, les petits gestes qui sauvent, les chambres sans rideaux, les regards qui se dérobent et les présences qui tiennent chaud. La réalisation signée Katel, fine comme un trait de fusain, laisse respirer chaque mot, chaque silence. Hirsutes, est une confidence jetée au monde avec la grâce de celles et ceux qui ne veulent pas avoir peur de dire. Demain nouveau, beauté lente et émotion vive, certains morceaux me disent, sans hausser le ton, que l'on peut encore croire à la poésie du réel (Matin trouvé). Qu'on peut encore apprécier la vie grâce aux mots en écoutant une chanson qui se pose discrètement dans l’oreille, mais qui résonne profondément, longtemps. Armelle Dumoulin, à fleur de mot, y déplie un univers à la fois tendre et rugueux, ancré dans la chair, la terre et les silences habités, une lumière dans l'obscurité. Elle chante sans appuyer, sans surjouer, comme on parle à un enfant ou à un amour qu’on retrouve après longtemps. Sa voix touche par ce qu’elle retient, par ce qu’elle laisse deviner. C’est une voix de passage, une voix qui traverse le cœur de quelqu’un qui a aimé et qui continue de marcher : Ce jour-là, magnifique, un joyeux en bout de disque, délicat ou je sens dans chaque note l'attention, la pudeur, la fragilité qui devient une belle force. Une musique au pas doux et au souffle chaud, quelques cordes, des claviers aériens, des battements feutrés et rien ne déborde, tout épouse. Dans cet espace suspendu, Armelle Dumoulin tisse une dernière mélodie puissante. Corbeau (Kervran en breton), je repars dans les signes qui viennent à moi. Dans cette dernière attention, je ressens les questions de racines, d’horizons intérieurs. Des liens, un signe et ça me parle doucement. C'est ce dont j'ai le plus besoin quand j'écoute un disque et celui-ci possède cette magnifique force d'émouvoir.


Tracklist
01 – Animalerie
02 – Hirsutes
03 – Les moyens du bord
04 – C'est clair
05 – Demain
06 – Les diagonales du vide
07 – Matin trouvé
08 – Le Pont
09 – Idiot
10 – Truc comme ça
11 – Ce jour-là
12 – Corbeau

11 avril 2025
Le furieux


www.armelledumoulin.com

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